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LA FRATERNITE AU MEXIQUE


    Diaire de Paco ( fraternité de Ciudad Hidalgo, Mexique)


PacoPlusieurs frères ont déjà parlé, mieux que moi, de cette fraternité, de ses priorités, de ses rythmes et des réalités du lieu... Mais aujourd'hui je veux ouvrir un chemin de partage avec tous.

Je crois que le meilleur chemin pour commencer est de remercier Dieu et les frères pour le don de la Fraternité et pour tout ce qu'elle représente pour moi. : je peux dire que tout ce que je suis et j'ai, je le dois à la Fraternité ; ma manière propre de lire et de vivre l'évangile s'est formée grâce au message et au vécu de la Fraternité et de chaque frère. La Fraternité nous a enseigné : la prière, la vie en communauté et la proximité des pauvres gens.

Aujourd'hui, plus que jamais, ces trois réalités permettent de nous situer dans la nouvelle culture où nous sommes mis, avec une clarté et une espérance qui, pour beaucoup, brillent par son absence. Pouvoir vivre dans la prière à la fois la recherche d'un Dieu qui nous surprend et qui, parfois, se cache, et notre mission d'intercession pour les crucifiés d'aujourd'hui et de toujours, représente une réalité suffisante pour donner un sens à notre vie et pour l'alimenter. C'est une grâce de pouvoir le faire avec d'autres frères, appuyés et animés par des amis, engagés dans la même recherche. C'est une grâce de découvrir que nos fragilités propres et celles des autres ne nous empêchent pas de vivre la joie de la Fraternité. Et c'est une joie encore plus grande de prendre conscience que ce chemin de communauté ne nous renferme pas sur nous-mêmes, mais nous ouvre à l'accueil, et nous rapproche de manière concrète des gens humbles qui nous entourent, et avec d'autres gens qui partagent notre recherche. Ainsi s'ouvrent, pour eux et pour nous, des espaces d'échange et de confiance qui nous enrichissent mutuellement, plus que ce que l'on pourrait espérer. C'est de cette manière, à la fois simple et profonde, que l'on découvre la simplicité et la profondeur des mystères du Royaume de Dieu : paix, justice, joie et amour. Sans négliger d'avoir les pieds bien mis sur le sol : nous petits... nous n'allons pas changer le monde, mais cela ne nous enlève pas non plus le sommeil, car c'était prévu depuis le début : nous n'avons pas inventé nous même l'histoire de la semence de moutarde ni celle de la poignée de levure... Ce qui compte c'est d'aller là où Jésus nous appelle, non pour se sentir meilleurs que les autres (nous ne le sommes pas), mais bien pour nous unir dans la reconnaissance au Père qui a révélé les secrets du Royaume aux humbles, aux petits, aux insignifiants et l'a caché aux sages.

Saurons-nous mettre en valeur, comme elle le mérite, cette simplicité, cette "insignifiance" ? La tentation du pouvoir en tous ses aspects (y compris le pouvoir clérical), reste toujours présente et peut nous mener à chercher un autre type d'efficacité, d'importance, de résultats assurés. Mais il suffit de voir où nous ont conduits les pouvoirs de l'argent, de la politique, de l'Eglise, pour nous soigner une fois pour toute de cette tentation : il est toujours plus facile pour un chameau de passer par le trou d'une aiguille, que pour un puissant d'entrer dans le Royaume des Cieux.

Je me réjouis beaucoup de notre fragilité qui inclut une certaine marginalité : je crois qu'il est de plus en plus urgent de vivre et souffrir en "dehors de la ville", en dehors de tout désir de pouvoir (sans oublier que le sacré est une des formes les plus cruelles du pouvoir), et chercher le Royaume parmi les petits, les exclus, le chercher dans les lieux méprisés de ceux qui n'ont pas de voix et qui n'arriveront jamais aux premiers postes.

Autre chose serait d'évaluer ma cohérence et mon engagement, au-delà des mes limites et mes contradictions : je ne perds pas pourtant le sommeil pour ça ; ce qui m'importe c'est de mettre les yeux sur le chemin, de suivre les traces en sachant, que Dieu n'est pas à la fin du chemin, mais qu'il est lui-même le chemin. Cela suffit.

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