Drapeau JaponDrapeau Coree
Visite de fraternité de Wakayama au Japon
et des fraternités de Corée
 



Carte    Comme j’essaie de le faire après chaque visite de fraternité, je voudrais vous donner quelques nouvelles et partager quelques impressions sur ce que vit Masaru et les frères de Wakayama et quelques mots sur ce que nous avons vécu avec les frères de Corée.

    Ces temps-ci, vous aurez entendu parler du Japon, soit à cause de la coupe du monde de rugby, soit hélas, à cause de « Hagibis » le typhon très violent qui s’est abattu sur la côte est, faisant de nombreuses victimes et dégâts dans les régions de Tokyo et Fukushima où en 2011 avait eu lieu le tsunami dévastateur, en particulier sur la centrale nucléaire. Ce pays doit bien souvent faire face aux tremblements de terre et aux typhons et ceci je pense, marque les gens, la culture, les mentalités et la relation à la nature.
Wakayama
    C’était la première fois que je me rendais en Asie, même si j’avais déjà entendu beaucoup de choses, quand on touche du doigt la réalité, on se sent tout de même dépaysé sur beaucoup de points, ce qui ne m’a pas empêché de goûter de belles choses, d’apprécier une bonne cuisine, les richesses d’une culture qui s’exprime par exemple dans l’harmonie du jardin, la beauté sobre des objets du quotidien, l’architecture des temples et monastères bouddhistes ou des maison anciennes, dans la façon de saluer et d’accueillir, dans la discrétion et la délicate attention aux hôtes. Tout est très bien organisé, précis, pratique pour être efficace. La densité des habitations surprend ; c’est presque une unique agglomération de Wakayama à Tokyo par exemple, sur plus de 500 Km.

    Mais il y a le revers de la médaille, et je schématise en disant que c’est une société avec des distributeurs automatiques partout, (on ne perd pas de temps à parler avec un vendeur !), une société où règne les emballages et le pré-confectionné. Mais tout cela c’est un regard extérieur, n’ayant pas eu de contact direct avec des personnes ne connaissant pas la langue. J’ai été très surpris aussi d’apprendre qu’il y a des milliers de jeunes qui restent cloitrés chez eux pendant des années sans contact avec l’extérieur, par peur d’affronter la réalité de la vie, suite à de blessures ou de traumatismes.
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Masaru     Vous savez que Masaru vit en fraternité avec André Gay et Ludo Ibaragi, PF de Jésus, qui vivent au Japon depuis les débuts de la Fraternité, et depuis une dizaine d’années ils sont ensemble à Wakayama. Dans cette même ville il y a une autre fraternité des PFJ où vivent Giang Minami et Nozomi Shiota.

    Le 24 septembre au matin Masaru m'attendait à l'aéroport de Osaka qui est sur une île artificielle construite sur la mer (pardon à l’écologie !); après une courte halte thé et l’échange rapide de quelques nouvelles, on prend la route pour Wakayama qui est à 30km. Le temps est beau, la température agréable !

    A la fraternité André (PFJ) nous accueil avec un bon repas. Il me raconte ses premières années à la Fraternité et comment il s’est porté volontaire pour le Japon ; c’est l’occasion de parcourir les années de la fondation. Ses propos me font une petite introduction à la vie japonaise.

    Dès le lendemain Masaru fait un programme pour mon séjour qui durera trois semaines ; il a bien pensé la chose et ce sera un séjour riche en découvertes, rencontres et partages, sans oublier quelques visites "touristiques" pour essayer de me faire goûter la culture, la tradition et la cuisine japonaise.

Fraternite    Première rencontre en soirée avec un petit groupe de personnes qui font partie de « la patrouille de nuit ». Ils se retrouvent deux fois par semaine à la fraternité avec Masaru. Ce soir je les accompagne. Après une prière, nous allons d’abord à la gare centrale de la ville, puis dans un parc du centre pour y rencontrer des personnes qui vivent ou ont fait Chapellel’expérience de la rue. Un thé chaud est offert et le dialogue commence, échange sur leur santé et autres sujets, puis chacun reçoit un petit sac avec de la nourriture et des médicaments si besoin. En saison froide des sacs de couchage et autres vêtements sont distribués. Masaru m’explique et me traduit ce qui se dit1. Il est depuis de nombreuses années engagé auprès de ces personnes marginalisées. Ce petit groupe de «patrouilleurs» va ainsi à la rencontre de ces personnes exclues, marginalisées. Depuis des années ils sont présents à ces gens et grâce à leur fidélité et persévérance, ils en ont aidé beaucoup à trouver une chambre qu’ils parviennent à payer grâce à la en récupération de l’aluminium. Mais la situation devient difficile car le prix de l’aluminium a beaucoup baissé ces derniers temps.
Pagode
   Souvent ces situations de marginalisation, d’exclusion naissent d’une discrimination due aux origines de la personnes, ou la perte de l’emploi, etc.. Un frère me faisait remarquer qu’habiter d’un côté de la rue ou de l’autre n’est pas indifférent, car elle dit quelque chose sur les origines des gens qui y habitent. Cette situation m’a fait penser à Thiruvanamalai (Inde), où les personnes "hors caste" doivent habiter dans des quartiers bien définis. Sur cette question, Masaru est en relation avec d’autres groupes sensibles à cette question.

   Voilà une première réalité que je rencontre ! Des gens marginalisés, souvent victimes du système économique et d’autres qui s’engagent auprès d’eux pour leurs droits. Des volontaires qui au nom de leur foi donnent du temps et d’eux-mêmes pour d’autres, qui sont démunis, blessés par la vie et la société, afin qu’ils retrouvent leur dignité. Ils se font prochains des plus petits, et rejoignent ceux qui sont relégués aux périphéries !

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Tsunami    Comme Masaru devait participer à une rencontre à Sandai au nord de Tokyo, il en a profité pour me faire découvrir la zone de Fukushima. Il y a 7 ans un violent tsunami a touché cette zone et endommagé la centrale nucléaire, avec les conséquences dramatiques que vous connaissez : fuite de matières radioactives, donc irradiation et pollution radioactive de toute une Région. C’est impressionnant de voir des villages entiers abandonnés par la population qui a dû fuir rapidement sans rien emporter. On ne peut même plus cultiver, car la terre elle-même est contaminée, comme l’herbe et toute la végétation ! Les conséquences humaines sont lourdes à porter pour ceux qui ont tout perdu !

    Des travaux pharaoniques sont engagés pour décontaminer les sols, on enlève partout 50 cm de terre qui est stockée dans d’immenses parcs. Mais doit-on seulement se contenter de trouver des solutions pour réparer les dégâts ? Ne faudrait-il pas plus radicalement s’interroger sur le nucléaire comme source d’énergie? Interrogation qui ne concerne pas seulement le Japon !
Centrale
    Alors se pose la question, du type de société, du modèle économique que nous voulons. On parle beaucoup d’écologie mais on est encore dépendant des centrales nucléaires, car nous sommes trop gloutons d’énergie. Dans ce domaine, Masaru s’engage avec conviction pour promouvoir une réflexion sérieuse sur le nucléaire, motivé par ce qui s’est passé et les retombées sur la population. Prochainement le pape François ira visiter le Japon, et un groupe sensible à ces questions aimerait qu’il dise une parole sur la question. Ils auraient aimé que François puisse visiter Fukushima, mais cela n’a pas été mis au programme de son séjour, hélas !

    Dans cette zone, à Chisokuann, une dame, maman d’une PSJ, a ouvert une maison d’accueil pour sensibiliser et aussi de prière, désirant que la dimension spirituelle fasse partie de la réflexion et Masaru y va régulièrement.

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Hachi     Masaru a été très attentif à me faire découvrir son pays et diverses réalités. En voyageant nous avons aussi visité plusieurs fraternités des Petites Sœurs de Jésus, toujours avec un accueil formidable et fraternel. J’ai été heureux de revoir Xavier Berthelot, un ancien frère qui est maintenant prêtre diocésain.

Freres    Masaru vit donc en fraternité avec André et Ludo. André, à cause des limites de l’âge reste à la maison, attentif aux courses et à la cuisine. Avec lui j’ai eu de bons échanges sur l’histoire de la Fraternité au Japon et en Corée et l’aujourd’hui de la Fraternité! Ludo qui est rentré d’un long séjour en Europe quelques jours après mon arrivée m’a fait découvrir les beautés de Kyoto, ses jardins avec une petite halte chez une amie de la fraternité de longue date.

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    Masaru avait le désir d’aller en Corée pour visiter la tombe de Tsuneo Yamaura, PFJ, décédé en 2019 . J’étais bien content de l’accompagner car je désirais aussi saluer les frères de Corée. Il m’a longuement parlé des relations douloureuses et complexes entre les deux pays, c’est pourquoi il a voulu que nous allions en ferry afin me faire voir concrètement la proximité des deux pays. Le voyage de retour se fera en avion ! Nous avons donc pris le bateau le soir à Shimonoseki pour arriver à Busan très tôt le matin.

    En passant, nous avons salué les PSJ qui vivent dans un quartier ancien marqué par la prostitution, et après un bon repas, nous avons pris le train express (2h30 de voyage) pour Seoul. Pierre Avril (PFJ) nous accueillait en gare et nous accompagnait à la fraternité de Hong-Jong toujours à Seoul où vivent Pyeong-Ch’eol et Hi-Su qui sont encore au travail.

    J’étais heureux de revoir Pyeong-Ch’eol qui avait fait « l’Année Commune » à Spello et bien sûr Hi-Su. Le lendemain, ils m’ont fait découvrir la ville avec ses beautés, son musée fameux et bien d’autres belles choses. Un jour nous sommes allés nous recueillir sur la tombe de Tsunéo, qui est sur le terrain d’un ami où il y a déjà celles de Vincent Corpet (PFJ) et d’une PSJ.

    Après deux jours, nous avons rejoint la fraternité de Ansan (Seoul) où vivent Pierre et Shin-Kwan qui sont à la retraite2. Ils ont bien préparé ces deux journées où nous serons ensemble : visite du musée des martyrs de Corée, une exposition à l’air libre sur la tragédie du bateau qui a coulé avec de nombreux étudiants de leur commune et une soirée culturelle pour découvrir comment l’âme coréenne s’exprime dans la danse, le rythme des tambours et la poésie, sans oublier que des amies nous ont invités pour quelque bons plats coréens au restaurant.

    Je reviens un peu sur la visite du musée/mausolée des martyrs. Pierre avait demandé à une dame qui parle le français, d’être notre guide. Motivée par sa foi toute nouvelle, elle a su faire revivre les évènements de cette époque, nous expliquer les symboles employés. Quelques-uns des témoins de la foi ont été canonisés certes mais bien d’autres sont resté cachés dans le cœur de Dieu, comme l’arrière-grand-père de Hi-Su par exemple. Ce musée est tout nouveau, il invite au recueillement par de grands espaces, des vides, des jeux avec la lumière naturelle, du silence, des œuvres artistiques qui expriment et suggèrent la tragédie mais aussi l’espérance née de la foi de ces personnes. Une petite chapelle est là, présence discrète qui invite à s’arrêter un moment.

Seoul    La Corée m’a semblé différente du Japon ; elle semblerait plus proche de notre monde occidental. Ce qui frappe là aussi, c’est la grande concentration de population, avec beaucoup de jeunesse. Il y a de nombreux immeuble de 30, 35 étages et plus qui poussent partout, comme des champignons. Regroupés souvent en ilots ils semblent écraser les petites maisons autour d’eux. Je pense aux personnes qui y vivent et combien il doit être difficile d’établir des relations de voisinage, avec comme conséquence le danger de la solitude. On trouve même de telles tours en pleine campagne plantés au milieu des rizières, et entourées de nombreuses serres.

    La question de la réunification est venue souvent dans les échanges. Sur cet argument j’ai senti qu’il y avait beaucoup d’attente et d’espoir.

    Contents de ces belles journées, nous sommes revenus à Osaka juste la veille de l’arrivée du typhon, qui heureusement ne s’est pas trop fait sentir à Wakayama. Et le surlendemain je rentrais en Belgique avec les yeux pleins de visages et de belles choses.

Merci à Masaru et à tous les frères et les sœurs pour les bonnes journées passées ensemble.
Yves


1 Tout au long de mon séjour Masaru aura eu la patience et la délicatesse de me traduire les conversations, m’expliquer l’histoire,
        pour ne pas me laisser ‘hors-jeu’. Merci à toi Masaru !

2 Merci aussi à Pierre, Shin-Kwan et Hi-Su feront de même en Corée.